21
Malibu, Californie
Dark coupa la communication, traversa la chambre pieds nus et descendit pour gagner le jardin. Là aussi, on voyait la main de Sibby, depuis les appliques et les bougeoirs en verre soufflé jusqu’aux meubles d’extérieur : tout était apaisant et réconfortant ; en ce lieu, on était à l’abri des soucis.
Il s’assit sur le canapé, laissa l’air vif de l’océan emplir ses poumons et contempla les minuscules points de lumière qui piquetaient le ciel. On aurait dit des milliers d’yeux ardents qui le fixaient.
Dark estimait avoir pris la bonne décision. Bien sûr, le monstre allait trouver quelqu’un d’autre. La semaine suivante, demain, peut-être. Qui sait si Sqweegel n’avait pas déjà trouvé une victime et, tapi dans quelque coin sombre, ne comptait pas les secondes avant de porter son coup ?
Peut-être Dark aurait-il pu intervenir.
Non. Surtout pas. N’y pense même pas. Ce n’est plus de ton ressort. Ne pense pas à la rousse en chemise de nuit bleue et au sang qui ruisselait sur son ventre blême et ses jambes.
Ne pense pas aux pleurs du…
Devait-il culpabiliser éternellement ? C’était beaucoup demander à un seul homme, non ?
Alors, comme ça, ils avaient promu Sqweegel à un niveau supérieur. C’était probablement ce dont il rêvait depuis le début. Mais, pour les tourments qu’avait subis Dark au cours des deux dernières années, il n’y avait pas de classification policière. Brusquement, il balança son mobile dans le patio avec une telle violence que l’appareil vola en éclats.
Dans la maison, les chiens se mirent à aboyer, effrayés par ce bruit. Dark entendit la baie vitrée du balcon coulisser derrière lui à l’étage.
Sibby passa la tête par-dessus la rambarde.
— Chéri ? Ça va ? Qu’est-ce qui s’est passé ?
Bon sang, quel imbécile. Il s’était laissé avoir.
Un instant plus tard, Sibby était en bas et s’asseyait en face de lui sur la petite cheminée de briques blanches. Elle ne l’avait pas vu dans cet état depuis le début de leur relation, depuis les jours où ses démons le tourmentaient encore, et il semblait très abattu.
Elle avait appris à marcher sur des œufs, à cette époque, et s’y prit en douceur. On ne pousse pas quelqu’un qui se trouve au bord du gouffre. On essaie d’abord de le faire reculer avant de tenter de comprendre de quoi il s’agit.
— Tu veux en parler ?
— Ce n’est rien, je me suis emporté, c’est tout. Ça capte mal, par ici.
— Qui essayais-tu d’appeler ?
— Personne d’important.
— Il est tard, pourquoi tu ne viens pas te coucher ?
— Dans un petit moment, je te promets.
Sibby repensa aux premiers jours ; elle avait vite appris qu’une seule chose était capable d’apaiser sa peine, d’éloigner ses démons, ne fût-ce que pour un instant.
Elle bougea lentement les jambes et remarqua que Dark la suivait des yeux. Le devant de sa chemise de nuit en soie était gonflé par son ventre, mais il ne pouvait détacher son regard de sa silhouette. C’était à elle de décider. Il attendait qu’elle fasse le premier pas.
Elle savait qu’il adorait l’effet qu’elle lui faisait. Steve avait besoin d’amour en cet instant, pour libérer son esprit. Même si c’était seulement temporaire.
Pour comprendre la relation de Steve et Sibby, connectez-vous sur LEVEL26com et tapez le mot de passe : sibby.